JEAN PIERRE DIONNET, HOMME MULTIPLE (Entretien, 3ième et dernière partie)
Continuons à égrener les souvenirs de Jean Pierre Dionnet. Dans cette dernière partie, nous allons parler de séries TV mais aussi de quelques unes de ses amitiés musicales. Donc deux sujets qui ne sont pas "100 % cinéma" (on fait une petite entorse à la règle), mais pourquoi se priver et bouder notre plaisir de l'entendre nous raconter de si passionnantes anecdotes...
Suite de l'interview par téléphone du Samedi 09 Mai 2020
Depuis quelques années maintenant, les séries ont plus de succès que les films, surtout chez la jeune génération, comment analysez vous ce phénomène? Est ce le fait que la psychologie des personnages soient plus travaillées en 13 épisodes qu'en 1h30 de long métrage?
Oui bien sûr. Et aussi parce que le cinéma se diversifie moins, il manque de trucs "à la Altman". On se retrouve avec des films venant de festival style Sundance ou alors de grosses machines. Mais au milieu y'a plus rien.
Et dans la série, les scénaristes viennent souvent du polar, ils peuvent aller plus loin que La couleur de l'argent. Prenez The wire, qu'Alain Carrazé (spécialiste du genre N.D.L.R) déteste parce qu'il dit que c'est plutôt un grand film de 5 x 12 heures...(The wire est souvent considéré comme la meilleure série de tous les temps. N.D.L.R)
Ou alors on a des mini série comme le Dracula de Moffat qui m'a laissé sur le cul...
Ah oui? Je suis fan de son Sherlock Holmes avec Cumberbatch, mais là j'ai été déçu par ce Dracula (diffusé sur Netflix).
Moi il m'a eu. J'attends la 2ième saison. Mais vous n'êtes pas le seul à avoir été déçu, et je connais tout un tas de gens recevables qui n'ont pas vu ce que j'y ai vu.
Ce qu'on ne reconnait jamais quand on juge une œuvre, c'est son état mental du moment. On peut rentrer dans un truc et y voir toutes les qualités en les apportant avec soi ou ne rien voir du tout parce qu'on est pas bien qu'on pense à autre chose. Etant cyclothymique, je suis passé à côté de certains films parce que j'étais un peu démoralisé ou melancolique et en les revoyant des années plus tard, ou j'allais mieux dans ma tête, je les ai apprécié.
Les séries, j'essaie de ne pas trop me laisser vampiriser (justement) parce que sinon, ça ne finit jamais.
Des western, il n'y en a plus beaucoup... Par contre il y a d'excellentes séries sur l'ouest sauvage comme Hell on wheels ou encore Deadwood. Er surtout il y a cette minisérie sensationnelle en 7 épisodes, digne d'Impitoyable ou d'Open Range qui s'appelle Godless. Vous l'avez vue?
Comment vous dites? Godless, non, mais on va aller voir ça. Parce que 7 épisodes, ca me va.
Lorsque maintenant, on me dit, il va y avoir une série sans fin sur le roi des lions avec Nicolas Cage, j'ai peur que ça m'absorbe. Parce que Nicolas Cage il me passionne même dans les navets, c'est une espèce de carrière de fou. Et je me dis, merde, si je dois me taper 12 épisodes + 12 + 12...
Y'a qu'une série ou j'attends avec impatience le dernier épisode de la 5ième saison et à qui je pardonne tout, parce que c'est le plus gros pot pourri du monde entre romance, histoire de science fiction et trucs barbares, c'est Outlander.
Suite de l'interview par téléphone du Samedi 09 Mai 2020
Depuis quelques années maintenant, les séries ont plus de succès que les films, surtout chez la jeune génération, comment analysez vous ce phénomène? Est ce le fait que la psychologie des personnages soient plus travaillées en 13 épisodes qu'en 1h30 de long métrage?
Oui bien sûr. Et aussi parce que le cinéma se diversifie moins, il manque de trucs "à la Altman". On se retrouve avec des films venant de festival style Sundance ou alors de grosses machines. Mais au milieu y'a plus rien.
Et dans la série, les scénaristes viennent souvent du polar, ils peuvent aller plus loin que La couleur de l'argent. Prenez The wire, qu'Alain Carrazé (spécialiste du genre N.D.L.R) déteste parce qu'il dit que c'est plutôt un grand film de 5 x 12 heures...(The wire est souvent considéré comme la meilleure série de tous les temps. N.D.L.R)
Ou alors on a des mini série comme le Dracula de Moffat qui m'a laissé sur le cul...
Ah oui? Je suis fan de son Sherlock Holmes avec Cumberbatch, mais là j'ai été déçu par ce Dracula (diffusé sur Netflix).
Moi il m'a eu. J'attends la 2ième saison. Mais vous n'êtes pas le seul à avoir été déçu, et je connais tout un tas de gens recevables qui n'ont pas vu ce que j'y ai vu.
Ce qu'on ne reconnait jamais quand on juge une œuvre, c'est son état mental du moment. On peut rentrer dans un truc et y voir toutes les qualités en les apportant avec soi ou ne rien voir du tout parce qu'on est pas bien qu'on pense à autre chose. Etant cyclothymique, je suis passé à côté de certains films parce que j'étais un peu démoralisé ou melancolique et en les revoyant des années plus tard, ou j'allais mieux dans ma tête, je les ai apprécié.
Les séries, j'essaie de ne pas trop me laisser vampiriser (justement) parce que sinon, ça ne finit jamais.
Claes Bang est le Dracula de Steven Moffat (2020) |
Des western, il n'y en a plus beaucoup... Par contre il y a d'excellentes séries sur l'ouest sauvage comme Hell on wheels ou encore Deadwood. Er surtout il y a cette minisérie sensationnelle en 7 épisodes, digne d'Impitoyable ou d'Open Range qui s'appelle Godless. Vous l'avez vue?
Comment vous dites? Godless, non, mais on va aller voir ça. Parce que 7 épisodes, ca me va.
Lorsque maintenant, on me dit, il va y avoir une série sans fin sur le roi des lions avec Nicolas Cage, j'ai peur que ça m'absorbe. Parce que Nicolas Cage il me passionne même dans les navets, c'est une espèce de carrière de fou. Et je me dis, merde, si je dois me taper 12 épisodes + 12 + 12...
Y'a qu'une série ou j'attends avec impatience le dernier épisode de la 5ième saison et à qui je pardonne tout, parce que c'est le plus gros pot pourri du monde entre romance, histoire de science fiction et trucs barbares, c'est Outlander.
C'est vrai (ravi), parce qu'avec ma compagne, on est absorbé par cette série...
Ah ça y est, je ne suis plus tout seul (ravi, aussi).
D'habitude sur Netflix, je regarde plutôt du Narcos ou Mindhunter ( géniales toutes les deux, d'ailleurs). Mais là, on cherchait une série à voir en couple, quelque chose de moins violent, et on nous avait conseillé Outlander. Les 3 ou 4 premiers épisodes, bof bof, et puis on s'est rapidement fait happer. Pourtant les acteurs ne jouent pas forcement très bien (comme Jamie qui a toujours la même expression de visage), mais on s'attache à eux, c'est exceptionnel. (Attention spoilers dans les prochaines lignes Ndlr)
Voilà, c'est ça. Claire dans la 5ième saison, qui se passe 20 ans après, a encore toujours la même tête, mais on s'en fout... Et Brianna a l'air d'avoir l'âge de sa mère, mais ça marche aussi. Et je suis vraiment content qu'on ai enfin tuer le méchant parce que lui il était affreux.
Ce qui me lasse un peu dans cette saison, ce sont les coucheries interminables, à heure fixe, de Jamie et de Claire...
Outlander: Jamie et Claire, un couple qui traverse...le temps |
Ah mais alors lui qu'est ce qu'il me manque! Je n'aurais pas voulu qu'on le tue, parce qu'en plus il était tellement touchant en mari moderne aussi... (l'acteur joue deux rôles, un officier Anglais particulièrement cruel du XXVIII siècle et son descendant, un bon père de famille au XXieme N.D.L.R). J'aimerais bien qu'il revienne, merde!
Récemment, vous avez publié votre autobiographie avec, à mon avis, le meilleur titre jamais trouvé pour ce genre d'exercice: Mes moires... Comment l'avez vous choisi?
Pour moi c'est Graham Greene qui avait trouvé le meilleur titre, ça s'appelait Une sorte de vie. Et je me suis dit dans le "genre auto diminution", qui correspond au livre d'ailleurs, on ne pourra pas faire mieux. Je me souviens de la terreur de mon éditeur qui m'a dit" Mais tu ne vas pas l'appeler comme ça" et je lui ai répondu "et ben si personne l'a jamais fait, on va le faire".
Ce livre qui a très bien marché est un peu maudit. Parce que l'acheteur qui veut le lire doit un peu galérer chez son libraire: une fois on le trouve dans le rayon rock, une autre fois dans le rayon cinéma... je me suis même retrouvé à coté d'un livre sur Chirac et d'un autre sur le maréchal Pétain. Ca m'a donné un coup de vieux de me retrouver dans le coin des livres d'histoires...
"Les souvenirs d'un ludion érudit et vibrionnant" (critique du livre par Didier Pasamonik le 03 Septembre 2019) |
En même temps c'est un peu votre faute, vous touchez à tous les domaines. On dirait que vous n'êtes jamais rassasié de connaissances et d'expériences...
Oh ben non, et là j'ai à nouveau une soif extinguible mais dure à rassasier. De toute façon, je ne connaitrais jamais tout, et ce qui m'intéresse ne fait que 20% du spectre de la connaissance. Mais, ça ne me gêne pas du tout. Ce qui compte c'est continuer à bouger comme disait Fred Astaire.
Et bouger pour se sentir vivant. Bouger à l'intérieur de soi avec des livres, des films. Même si je fais partie maintenant, des yaourts qui ont passé la date de péremption.
Là, j'attends le 11 mai (l'interview a été faite deux jours avant lé déconfinement N.D.L.R) pour retrouver ma maison de campagne avec tout mes bouquins.
J'avoue avoir plutôt bien vécu ce confinement avec ma compagne et mes enfants. j'étais entouré de ma famille. Et pour vous comment ça s'est passé?
C'est vrai, ça n' a pas été désagréable. A partir du moment ou, dans la tête on arrive à s'évader avec les livres...Mais y'a des gens très bien qui ne lisent pas de livres, ce n'est pas une obligation d'ailleurs, c'était le cas de mon père qui n'aimaient pas lire des fictions.
En fait là, je suis plutôt sur 2 scénarios de BD dont un qui va faire 80 pages et j'essaie de ne pas prendre de note, c'est la méthode qu'utilisait Truman Capote pour les interview qu'il menait.. Je voulais voir si cette méthode, que j'avais essayé plus jeune, me convenait encore.
Mais après les Bd, je reviens à l'écriture d'un bouquin, avec une histoire obsessionnelle pour moi. Mais je n'en connais ni la cause ni la vraie raison.
Et j'ai aussi un projet musical, là un peu en stand bye, mais qui peut ressortir demain.
La musique justement... J'aimerais que vous me racontiez une anecdote sur Michael Jackson.
J'ai joué au ping pong avec Jackson mais l'anecdote que je vais vous raconter est arrivée à Philippe Manœuvre. Pendant la tournée Victory tour des Jacksons, il discutait avec Jermaine Jackson. Et Jermaine lui dit en lui parlant de Michael "Regardez, la porte des toilettes, il n'osera ni l'ouvrir ni la fermer parce que dès l'âge de 5 ans, on lui a dit: Tu n'auras jamais ni à ouvrir ni à fermer une porte"...
Manœuvre enchaine et dit à Jermaine qu'il a trouvé le concert de la veille formidable et Jermaine lui répond "Non, Michael a trouvé que c'était pas bien, et toute la nuit il a répété jusqu' à se mettre les pieds en sang, et vous verrez ce soir le résultat à Dallas". Et effectivement, il avait des chiffons autour des pieds, mais le concert de Dallas a été beaucoup mieux que Houston. Exceptionnel!
Et ça Philippe n'a pas osé me le raconter sur le moment, car c'était l'intimité de la famille, parce qu'il est rock et qu'il n'aime pas contourner les légendes... Moi j'adore ça, les colosses aux pieds d'argile, ça les rend humains! Lui, les pop stars, il aime bien les "mythologiser", c'est son droit. C'est pour cela que notre duo a fonctionné. Si on avait pensé de la même facon , ça n'aurait eu aucun intérêt.
Les frères Jackson lors de leur tournée Victory tour en 1984 |
Ca a été une triste histoire, parce qu'on a pensé à moi 3 fois dans ma vie pour carrément devenir patron de chaine. La première, quand La cinq a été lancé. J'étais pistonné par quelqu'un de la famille ( mais marginalisée au sein d'elle) qui lançait la chaine, et donc ca n'a pas été possible.
La deuxième fois, pour Canal +, quand on a découvert que Dominique Farrugia (alors président de la chaine cryptée) était un psychopathe, malheureusement malade, pouvant être très gentil et 1 heure plus tard vous envoyer bouler, on ne savait pas pourquoi. Y'a eu un complot pour que je le remplace. Xavier Couture, alors PDG, voulait me mettre à la tête des programmes, mais il s'est fait viré par "le pharmacien qui était au dessus": Bertrand Meheut. Et après ça, Couture est parti sur Orange et encore une fois, il a pensé à moi, mais ça n'a pas aboutit non plus.
Mais ou j'y ai vraiment cru, c'était Canal. On faisait des "réunions complotistes" dans les cars régie de la chaine. J'avais vu qu'il y avait encore plein de choses a faire. En gros, Canal avait toujours pris un peu d'avance sur les publics de niche, que ce soit les corridas ou autres choses. Y'en avait encore d'autres à choper. Je me souviens que je m'étais passionné, et là je pense au chanteur Christophe, pour la pétanque. Ca été fait depuis, mais ça n'a pas été fait bien. Parce que pour la pétanque, on aurait été Place des Lys à St Tropez, à se retrouver entre un local qui joue comme un dieu et Quincy Jones qui se débrouillait pas mal... Et Christophe, très bon joueur, avec toujours son rouleau de billets dans ses bottes.
Christophe parti récemment le 16 Avril 2020 |
Oh la la, oui. Pour nous, pour la France, ce fut la pire perte. On l'aimait tous... Pour des raisons diverses d'ailleurs. À la fois homme de variété, et à la fois constamment en évolution... parce qu'il était là, présent! C'était un personnage hors norme, d'une excentricité totale, qui assumait son existence "d'être à côté".
Pour le public qui ne le connaissait pas personnellement, il avait cette image de quelqu'un qui avait fait de la variété et en même temps, d' un véritable oiseau de nuit "très rock'n' roll". Il ne jouait pas, il était authentique.
Oui exactement. Soyons clair, en France, on a une filière rock'n'roll assez étroite. Ca débute avec ce maudit Dick Rivers, ça continue avec Christophe et puis après arrive Bashung. Mais Bashung à la fin de sa vie se prenait trop au sérieux, bon ça coïncidait aussi avec sa fin physique. Je trouvais qu'il avait perdu son sens de l'humour et son côté déconneur, c'est dommage.
Dick Rivers, Christophe, Higelin, Bashung...
Et Dick disait "Moi, j'ai raté ma carrière mais de toutes façons j'aurais préféré être Bashung plutôt qu' Hallyday".
Mais ceci dit, ce qu'on appelle la variété, c'est pas mal. Moi, y'en a un dont je suis très client, formidable guitariste, c'est Francis Cabrel.
Et aussi, un auteur de textes sublimes.
Oui, de superbes textes. Quand on me demande pourquoi j'aime Cabrel, je réponds "Mais vous êtes cons, vous n' avez qu'a écouter, c'est super".
La simplicité au service d'un talent immense...Francis Cabrel |
Oui, c'est vrai car il y a un âge ou on est con. Jeune, je me rappelle qu'on fredonnait au café du coin la chanson Chez Laurette. Mais en dehors, on ne disait pas à nos potes qu'on aimait bien Delpech. On disait qu'on était Rythm and blues, qu'on était Sam and Dave ou Joe Tex. On essayait de danser comme eux. Maintenant, on peut l'assumer.
Et puis Cabrel c'est un personnage qui dégage une simplicité très attachante. Et tous ces textes, sans exception, veulent dire quelque chose... On les adapte à notre vie.
Exactement. Par exemple, un qui me gonfle, c'est Jean Louis Murat, parce qu'il s'oppose aux autres." Moi c'est bien, c'est pas comme Cabrel qui marche toujours!"... Mais qu'est ce que ça veut dire mon pote! Chacun fait ce qu'il veut.
En parlant de textes de chansons, j'avoue que ceux de Bergman pour Alain Bashung, je les trouvais un peu opaques, pas vous?
Oui, mais ils ont marché, c'est ce qui est drôle. Bergman a vraiment fait les meilleurs textes du répertoire d'Alain. Avec ceux aussi du parolier de C'est la ouate, je ne me souviens plus son nom. (Pierre Grillet, auteur de Madame rêve pour Bashung. N.D.L.R), un trainard de nuit qui faisait semblant d'être un peu fainéant, mais en fait qui travaillait beaucoup.
Le sommet pour Bashung, c'est Rio grande, grâce aux textes aussi. On est dans la perfection. Mais bon, je suis partial, car à l'epoque, on se voit beaucoup, on s'entend vraiment bien.
Le directeur artistique veut mettre son visage en très gros plan sur la pochette du disque, moi j'trouve ça naze. Et puis une fois le résultat fini, je me dis "il avait raison, ça marche..."
Vous préférez ce disque là au Play blessures que lui a fait Serge Gainsbourg en 1982?
Oui... Pour Play blessures, je me retrouve au milieu. Gainsbourg était quelqu'un de très autoritaire sur ses textes, et Bashung discutait chaque choix, juste parce qu'il avait envie de "tout discuter", et ça a finit par lasser Serge. Alors, Gainsbourg a décroché et a mis "le curseur à moitié".
Je me souviens d'une conversation, un jour pendant l'enregistrement du disque. J'suis arrivé, ils étaient blancs comme des linges, ils devaient travailler depuis je ne sais quelle heure, ils ont fait une pause et on a bu un 102 (double ration de Pastis 51. N.D.L.R), puis Serge m'a dit "On va te laisser, on retourne se suicider"... Drôle d'ambiance...
D'ailleurs ils ont fait deux trucs et puis ils ont arrêté leur collaboration.
Par contre, avec un type comme Alain Chamfort, avec qui il s'entendait très bien, il a mis "le curseur à fond".
Gainsbourg l'auteur et Bashung le compositeur de l'album Play Blessures |
De toutes façons le monde est petit, car toutes les traductions des textes de Gainsbourg pour les reprises de ses chansons en Anglais , que ce soit pour Placebo ou Prodigy, ont été adapté par Boris Bergman. Il a fait les paroles anglaises. Ce sont parfois des "trahisons ", car il y a des textes Gainsbouriens intraduisibles. Parfois, il adaptait exactement et d'autres fois il devait trouver des paroles différentes mais qui devaient avoir le même sens sur le fond.
Quand on vous dit: c'est une chanson pour Carla Bruni, pour Marianne Faithfull, pour les Pogues ou pour Placebo, et bien il faut en tenir compte.
Ce que Bergman a préféré, c'est enregistrer avec les Pogues. Il avait tellement peur qu'ils débarquent ivres morts au studio ... et pas du tout, ils sont arrivés hyper clean.
Le groupe Londonien The Pogues (avec Shane Mac Gowan sur la droite) |
En fait des que la prise fut bonne, là ils se sont bourrés la caisse. Et lui s'est démolit comme beaucoup après.
On avait l'impression que Gainsbourg était extrêmement anxieux et bileux. Est ce que l'on peut dire qu'il s'était crée un personnage?
Oui, extrêmement anxieux et pas très heureux, pensant comme Jean Carmet, que le succès venait trop tard. Qu'il aurait du arrivé quand il était jeune, quand il n' avait pas d'argent, et que tout le monde trouvait qu'il avait une sale tête, surtout les nanas.
Et toujours ce besoin de reconnaissance auprès des gens, alors qu'il était reconnu comme un auteur compositeur de grand talent.
Chamfort disait "Moi, qui étais en admiration devant lui, comme on l'était tous d'ailleurs, on pensait que ça le rendait heureux..." Et non, en fait! C'est seulement quand il a eu ce gros succès populaire avec Aux armes etc, que là il a été fier. C'est exactement comme Paul McCartney, quand il y a deux ans, il a eu avec son dernier disque un N° 1 au hit parade. Il a dit "Mais c'est génial, ça fait 35 ans que je n'ai pas été 1er dans un Top".
C'est marrant que vous parliez de McCartney, parce qu'en ce moment, je lis un bouquin sur lui. C'est un sacré personnage aussi.
J'espère que le livre c'est Des mots qui vont très bien ensemble, car il est vachement bien.
Oui c'est celui ci. J'en suis au chapitre ou il parle de sa notoriété. Il raconte "quand j'ai eu beaucoup d'argent, je me suis acheté comme tous les riches une Rolls Royce. J'avais engagé un chauffeur, mais j'avais rien compris, car j'adore conduire et en plus, à l'arrière, dans tous les virages j'étais malade".
C'est marrant dans ce livre là, on découvre qu'il est vraiment fou, mais un fou à l'allure tranquille. Moi, j'ai mis du temps à le lire parce ce que le contenu est tellement riche.
Paul McCartney ou la gentille folie d'un génie de la musique. |
Le journaliste de rock, Paul Du Noyer, qui le questionne, est très fort aussi..
Oui. Très bon. Les entretiens se déroulent sur une période de plus de 10 ans.
C'est marrant, je m'étais bien entendu avec McCartney. La première fois que je l'ai croisé, c'était à un concert d'un mec de sa génération qui faisait du skiffle. Il s'était posé dans un coin pour l'écouter, et je suis allé m'asseoir à ses côtés pour discuter un peu.
Et quand je l'ai revu, ca s'est passé moyennement parce que Manoeuvre n' avait qu'une hâte, c'était rentrer à Paris. Il n'a même pas voulu aller diner chez McCartney!
Oui. Très bon. Les entretiens se déroulent sur une période de plus de 10 ans.
C'est marrant, je m'étais bien entendu avec McCartney. La première fois que je l'ai croisé, c'était à un concert d'un mec de sa génération qui faisait du skiffle. Il s'était posé dans un coin pour l'écouter, et je suis allé m'asseoir à ses côtés pour discuter un peu.
Et quand je l'ai revu, ca s'est passé moyennement parce que Manoeuvre n' avait qu'une hâte, c'était rentrer à Paris. Il n'a même pas voulu aller diner chez McCartney!
Ah! C'est dommage ça.
Je l'avais accroché sur un truc, en lui parlant de Bill Fury ou de Lonnie Donegan que j'adorais. Et tristement il m'a répondu "Oui c'est terrible, car avec les Beatles on les a balayé, moi aussi je les adorais".
Longtemps après, sans Manœuvre, j'avais contacté son manager à Apple (maison de disque fondée par les Beatles) pour faire un truc qui s'appellerait Flashback sur les chanteurs ou les groupes avant lui, qui l'avaient marqué comme l'Australien Franck Ifield (d'ailleurs ils ont fait ensuite un disque ensemble pendant les Beatles).
Je voulais carrément aller avec lui revoir tout les lieux, et même bien avant la période Hambourg des "Fab Four". Sur le principe, McCartney était d'accord mais peu de temps après, il a débuté ce livres de mémoires avec Du Noyer.
J'ai bien compris, en écrivant mes propres mémoires, "qu'aller puiser au puit du passé, c'est pas évident, faut pas remettre ça trop souvent".
Juste pour finir, vous avez rencontré tellement de gens que vous pourriez être blasé, mais quelle est la rencontre qui vous a le plus impressionné?
Le personnage le plus extraordinaire que j'ai rencontré, il n' était pas loin, c'était Charlie Schlingo, avec son monde de BD totalement absurde, les disques avec les Silver d'Argent complètement barrés, avec son ivrognerie calme et retenue. Donc ce n'est pas un personnage qui a le statut de star , même si, maintenant, il est l'objet d' un prix au Festival de la BD à Angoulême. Il m'a plus impressionné que Brando, Gainsbourg, Robert Evans (célèbre producteur Hollywoodien) ou encore Eric Ambler (écrivain et scénariste Anglais).
Charlie Schlingo |
C'était un plaisir, c'est pour ça que j'étais inquiet de comment on allait le faire (au début du projet on s'était mal compris, il pensait que je voulais le faire uniquement par mail et réciproquement. N.D.L.R).
Et pour vous aussi, plein de projets car vous avez encore le temps de les faire, mais on n'en fait jamais assez. Moi, je regrette les périodes ou je me suis laissé aller à des trous, mais ça, ça arrive. Parce que parfois, quand on a trop produit, on est un peu brûlé et en fait on cherche ses piles... Mais quand on aime écrire, même si on n'est pas top, rien ne nous empêche d'essayer un peu.
Là, d'ailleurs, j'ai envie d'écrire un bouquin sur l'univers de Sherlock Holmes...
Commencez à y réfléchir et quand l'idée vous passe par la tête, pensez à noter sur un cahier. Une première idée, une deuxième et puis une troisième, parce qu'il ne faut jamais laisser filer une idée, sinon elle ne revient plus...
FIN DE CET ENTRETIEN.
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