ENTRETIEN AVEC ALAIN SCHLOCKOFF (partie 2)
Nous continuons notre entretien avec Alain Schlockoff , grand professionnel et spécialiste du cinéma fantastique...
Alain Schlockoff en compagnie de la regrettée Tina Aumont |
Mon acteur préféré de tous les temps reste Peter Cushing. J'ai eu la chance de le rencontrer et de devenir son ami.
Outre son talent d'acteur, c'est la personne qui m'a le plus impressionné par ses qualités humaines.
(Alain Schlockoff lui avait consacré la couverture du numéro 19 de l'EF avec ce joli titre: Peter Cushing, le gentleman du fantastique).
Peter Cushing "est" Sherlock Holmes dans Le chien des Baskerville (1959) |
C'est drôle, ce midi je parlais à mes filles du clip Thriller de Michael Jackson et je leur disais que le rire glacial et mythique qu'on entend à la fin était celui d'un monument du cinéma: Vincent Price.
Oui , un très grand acteur.
Et comme on parle du clip Thriller, je suis toujours ami avec John Landis, le réalisateur ( parmi ses films: Le loup garou de Londres, Les Blues brothers ou encore Un fauteuil pour deux).
Je l'ai connu très jeune à Los Angeles quand il était assistant. On est devenu ami tout de suite.
Très content qu'il ai eu un tel succès en réalisant ce clip. Car c'est un vrai passionné du genre. Michael Jackson adorait aussi le fantastique.
John Landis et...son animal de compagnie? |
Finalement on cite souvent l'Exorciste, La malédiction ou Amityville mais, à sa façon, peut on dire que le clip de Michael Jackson a contribuer à démocratiser le fantastique?
Comme tout le monde, j'ai vu le clip un samedi soir de 1983 à l'émission Champs Elysées de Michel Drucker. J'ai été subjugué, je ne m'attendais pas à ça. Ce fut un tel évènement que dès le lendemain, on a décidé d'en faire un article dans l'EF, alors que le bouclage était prévu dans quelques jours.
On a même décidé de mettre Thriller et Jackson en couverture. Le magasine a été epuisé en 4 ou 5 jours.
C'est un beau souvenir.
Que pensez vous de Roger Corman (92 ans cette année), producteur et réalisateur emblématique aux USA?
J'adore Roger Corman. Il a commencé sa carrière à la fin des années 50. Il n'est pas très connu en France. Pourtant ses premiers films tirés d'histoires d'Egard Poe ont bien marché comme La chute de la Maison Usher ou Le corbeau...
Mais c'était une époque où le nom du réalisateur importait peu. Tout le monde ou presque s'en foutait de savoir qui avait réalisé le long métrage. Ses films étaient assimilés à Poe. Le nom de Corman, ça ne parlait à personne.
Ca a beaucoup changé maintenant on va voir un film de tel ou tel réalisateur.
Roger Corman et Vincent Price |
Et Stuart Gordon, qui vient de nous quitter. Que vous inspirait sa carrière?
Je l'aimais beaucoup. C'était un excellent réalisateur. Il venait du théâtre ou il faisait du "Grand guignol"( des pièces de théâtre souvent outrageantes et sanguinolentes)... Puis il s'est associé au très bon Brian Yuzna et c'est comme ça qu'ils ont fait leurs films tirés de romans de Lovecraft: Ré animator ou encore From Beyond (Aux portes de l'au delà). Des petits bijoux.
Il y a un film de lui que je n'ai pas vu c'est Dagon.
Stuart Gordon prend une pose "à la Hitchcock" |
Vous êtes un des rares à mettre les actrices en avant dans vos magazines. Dans le genre fantastique, elles sont souvent reléguées au second plan. Trouvez vous qu'elles ont la place qu'elles méritent ?
On a toujours parlé d'elles. Dans Fantastyka, il y avait une rubrique qui parlait de leurs carrières.
D'ici un an environ, il y aura un numéro de l'EF vintage qui leur sera consacrée.
J'ai eu la chance d'en avoir rencontré beaucoup comme Caroline Munro, que j'ai vu souvent.
Plus celles que j'évoque avec qui j'ai eu des liaisons comme Ingrid Pitt ou Tina Aumont.
La très belle actrice Britannique (d'origine Polonaise): Ingrid Pitt |
Quel film, selon vous, est parfois surestimé, soit par la critique soit par l'accueil du public?
Je n'ai pas aimé l'Exorciste. Pourtant c'est plutôt bien fait. A l'époque de sa sortie, il y a eut un tel battage médiatique autour.Mais comme j'aime le genre, je préfère toujours qu'un film soit surestimé et encensé plutôt qu'il passe inaperçu.
Comment d'ailleurs, en tant que journaliste, arrive on a à juger la qualité d'un film?
Moi, je fais appel à ma mémoire. Et surtout, je replace toujours le film dans son contexte.
Par exemple: Le cauchemar de Dracula (1958. Production Hammer), je le considère comme un chef d'œuvre. A l'époque quand il est sorti, il faisait très peur. Tout était nouveau dans ce film. Que ce soit les couleurs, la violence ou l'érotisme qui s'en dégageaient.
Puis pendant des années, on ne l'a plus vu. Il n'était plus forcement programmé. Les spectateurs ont vu ses succédanés (souvent mois réussis).
Donc, quand des années plus tard, le film a été redécouvert, il y a avait une impression de déjà vu. Les gens ont été déçu. C'était injuste, car le film a sa sortie était novateur.
Le "cauchemar" de Dracula était aussi le nôtre... |
Par contre au début des années 2000, sont sortis des films volontairement provocants et extrêmement violents comme Hostel ou le très controversé The human centipede. Comment avez vous réagi face à cette mode?
The human centipede, j'ai carrément refusé de le voir. Je trouvais ça abject. Le scénario me répugnait. Les jeunes ont aimé ça. C'est comme faire un tour de Grand huit, ça provoque des sensations.
Je n'aime pas la violence gratuite, je préfère quand elle est justifiée.
Pour la mode des "torture porn", c'est un peu différent. Certains sont pas mal. Par exemple Saw repose sur un réel suspens.
Ce sont les Italiens qui ont inventé le genre dans les années 80 avec un meurtre toutes les 10 minutes chrono.
Le genre Slasher a été aussi inventé par un Italien: Mario Bava avec La baie Sanglante. Et avec Six femmes pour l'assassin il fut le précurseur du Giallo ( voir partie 1).
La baie sanglante, un classique Italien "tranchant" |
Certains films vieillissent mal quand même. Avec ma compagne Johanna, on a essayé de revoir le Batman de Tim Burton (1989), C'est quasiment irregardable...
C'est possible , je ne l'ai pas revu. En règle général je n'aime pas revoir les films.
C'est très rare. A part peut être La maison du diable (1962) de Robert Wise qui reste un chef d'œuvre absolu. L'angoisse et l'épouvante sont suggérées. Je l'avais vu à sa sortie et depuis je l'ai revu une cinquantaine de fois. Par contre lors de sa dernière vision, je me suis ennuyé. Il n'a pas spécialement vieilli, mais à force de le voir et de décortiquer chaque plan, je m'en suis lassé.
Julie Harris "confinée" dans La maison du diable |
Certains films sont tellement remarquables comme le King Kong de 1933. Il possède un charme intemporel.
King Kong, un évènement dans l'histoire du cinéma. |
Quels sont les autres genres dans le cinéma que vous affectionnez?
Pleins. Par exemple, je suis un passionné de western.
Que ce soit l'Américain avec ses décors, ses grands espaces et la psychologie des personnages très fouillée.. Le genre, chez eux, remonte au muet. Souvent les films étaient tirés de romans western.
Mais aussi le western Italien. Il y a une dimension fantastique dans ces westerns. Les Italiens ont le sens du baroque, de l'image, des couleurs et la musique angoissante qui accompagne le film. A l'inverse des Américains, les Transalpins ont crée "l'antihéros" comme personnage principal.
Ce qui confère au film, un petit côté sadique et pervers.
En plus beaucoup d'acteurs du fantastique (comme Klaus Kinski) ont commencé dans les westerns spaghettis.
J'aime aussi la comédie musicale, notamment La mélodie du bonheur avec Julie Andrews. C'est un de mes films préférés
Julie Andrews dans le classique aux 5 Oscars de Robert Wise |
Alain Schlockoff, lors de la 9ieme édition du festival Bloody Week end |
FIN DE LA PARTIE 2 (à suivre)...
vivement la partie 3 !!!
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